Paul Meyers
Art & Photography
Mort d’un arbre
Lourds sonnent les pas,
Du bûcheron qui s’approche,
S’approche le trépas,
De l’arbre ancré dans la roche.
L’homme jette un coup d’œil,
Sur cette masse géante,
Géante depuis le seuil,
Splendeur de plante.
Lourdement s’enfonce la hache,
Dans ce bois vivant,
Vivant et plein de taches,
Terni par le passage des vents.
L’arbre sursaute de la tête au pied,
Une douleur atroce le transperce,
Transperce son corps tout entier,
Et une coulée de larmes perce.
Grave est la blessure,
Mais non mortelle encore,
Encore passible de suture,
Par des soins pourrait se clore.
Coup sur coup la hache persévère,
Arrache des morceaux de vie,
Vie pourtant si chère,
Pleine d’histoires remplie.
Chaînon par chaînon se casse,
Insupportable se fait la douleur,
Douleur qui empire et s’amasse,
S’érige vite en horreur.
S’intensifie la danse de l’outil,
Nervure sur nervure entame,
Entame jusqu’à cette frêle coquille,
Qu’est l’âme qu’on condamne.
Des craquements se font entendre,
Se brise du chêne le cœur,
Cœur qui doit se fendre,
Tout l’arbre est en pleurs.
Tremble sa couronne,
Reine et majestueuse,
Majestueuse de sa personne,
Sur stature volumineuse.
Doucement se penche,
La tête et puis le corps,
Corps lacéré qui flanche,
Pour subir son pauvre sort.
Quelques soubresauts encore,
De ses bras de branches,
Branches en prière alors,
Vers la terre se penchent.
Un petit vent se lève,
Comme pour dire adieu,
Adieu à cette sève,
S’écoulant sur plancher des cieux.
S’extasie l’homme,
Devant cette belle victime,
Victime décédée pour l’homme,
Qui commit un crime.
Finie l’agonie triste,
De ce bois de marbre,
Marbre ; mais en bout de piste,
La mort d’un arbre.
P. Meyer